dimanche 16 août 2015

Le Voyage d'Octavio, de Miguel Bonnefoy

Ce petit roman écrit pas un jeune franco-vénézuélien fait tout de suite penser aux romans latino-américains par son côté fable picaresque, ce qui n'est pas pour déplaire. Le récit frôle constamment le merveilleux, l'onirique.
Le héros, Octavio, est pauvre, analphabète et peu enclin aux bavardages. Son analphabétisme l'empêche de se mêler au monde des liseurs, et la ruse est indispensable. Pour éviter de devoir écrire, il se coupe régulièrement la main et porte un bandage - il pourrait le porter sans avoir à se couper avant, mais l'honnêteté l'emporte - pour s'excuser de ne pouvoir tenir un stylo.
Pris dans un cambriolage qui tourne mal, il se contraint à s'exiler. Il quitte donc Saint-Paul du Limon- petite ville qui doit son nom à un citronnier salvateur, selon une légende - et parcourt les chemins d'un Vénézuela fantasmatique et intemporel.
Ce voyage forgera Octavio, le révèlera à lui-même.
Le roman suit une structure classique - la quête, le voyage initiatique, la fable - et l'écriture est merveilleusement maîtrisée, je dirais même trop appliquée. Mais finalement, il y a aussi tellement d'invention dans ce récit qu'il nous emporte jusqu'aux dernières pages avec plaisir et dans la surprise.
Miguel Bonnefoy: à suivre.


Les flots poussèrent un râle dément, sourd. Tandis qu'Octavio avançait, le torrent poussait comme un bélier. Les muscles de l'hôte se réduisaient, son squelette s'amincissait, Octavio le sentait s'affaiblir, s'amollir en route. Et pourtant, à chaque pas, la charge se faisait plus lourde. L'hôte ne parlait déjà plus, il gazouillait comme un nouveau né. Ses jambes devinrent ballantes autour de la nuque, ses mains jouaient avec l'air. Il perdait son âge.


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