lundi 20 avril 2015

Baronne Blixen, de Dominique de Saint-Pern


Quel délice de passer ainsi du Kenya au Danemark en suivant les traces d'une grande dame excentrique! Baronne, aventurière, propriétaire d'une plantation en Afrique, puis écrivain, Karen Blixen ne pouvait qu'inspirer les biographes. Dominique de Saint-Pern prend le parti de commencer cette biographie lorsque Karen Blixen a déjà une quarantaine d'années et s'apprête à quitter le Kenya contre son gré, alors qu'elle y a vécu dix-neuf ans. 
Elle choisit également Clara Selborn, exécutrice littéraire de l'écrivain, comme narratrice réinventée de ce roman qui la voit rencontrer Meryl Streep à l'occasion du tournage de Out Of Africa. Les deux femmes, selon la volonté de la biographe, passent ainsi des moments d'échanges et de rencontres autour de la vie que Blixen a menée au Kenya une cinquantaine d'années plus tôt. Sa ferme, les gens de sa plantation, puis ses luttes, son attachement à ses terres, son amour pour Denys Finch Hatton, ses exubérances frivoles, tout cet univers se dessine sous nos yeux, empli de senteurs et des couleurs flamboyantes de la savane. 
Au-delà de cette histoire personnelle, on y lit cette faune d'enfants d'aristocrates danois, anglais, norvégiens, enfants terribles d'un vieux monde dans lequel ils étouffent et vivant sur cette terre sauvage comme sur un terrain de jeu: drogues, sexe, safaris, un monde incestueux dans lequel tout le monde est lié d'une manière ou d'une autre; on peut y deviner enfin la voix distante mais présente de Dominique Saint-Pern, qui, sans condamner le comportement de ces colons, n'hésite pas à montrer, parfois, leur paternalisme révoltant.


par Peter Beard
Clara Selborn ne connaît le passé de Karen Blixen en Afrique que par ce que celle-ci lui en a dit, car la jeune femme, à l'époque, ne rencontrera celle qui l'envoûtera, au point de lui faire quitter des études prometteuses pour se mettre à son service, qu'au Danemark.

Deuxième partie du livre. Seule, séparée de son mari qui au passage lui aura transmis la Syphilis, la plantation en faillite, la voilà donc contrainte de rentrer vivre auprès de sa mère et d'être traitée, alors qu'elle a quarante-huit ans, comme une jeune fille sans expérience. En 1933, le poids de la société sur les femmes célibataires est encore très lourd. Cependant, grâce à ses frère et soeur, elle se plonge dans l'écriture et une nouvelle étape de sa vie commence, remplie de rencontres littéraires et d'élans furtifs jusqu'à cette rencontre avec Thorkild Bjornvig, jeune poète danois qu'elle envoûte comme elle seule sait le faire. La Karen Blixen machiavélique, sorcière, se dessine peu à peu sous des dehors de plus en plus méprisables, et pourtant, on continue à s'attacher à elle.


La lecture de ce roman a été un vrai bonheur, notamment par toutes ces images d'Out Of Africa de Sydney Pollack, qui me revenaient régulièrement. la deuxième partie, au Danemark, m'a plus semblé être une succession de petits événements, parfois maladroitement assemblés, et j'aurais aimé avoir plus de références à son travail d'écrivain, mais ce livre m'a donné envie de me plonger dans l'oeuvre de la baronne.
Je remercie vivement Babelio, le Prix Relay et les éditions Stock pour cette belle découverte!

Au matin, en miettes, elle avait repoussé les persiennes du wagon. Une vague brûlante avait frappé son visage. La brousse à perte de vue, des troupeaux d'animaux qui, jusque là, n'existaient que sur les planches de dessins. Gnous, zèbres, antilopes... quelle ménagerie invraisemblable! Le train les frôlait sans les déranger. L'Afrique, l'immense et somptueuse Afrique, lui ouvrait les bras.



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