mardi 20 décembre 2016

Les Indiens d'Amérique du Nord, d'Edward Curtis

Pendant plus de trente ansEdward Curtis, photographe, parcourut les Etats-Unis afin de témoigner de la vie et des coutumes des différentes tribus indiennes. Eloge funeste, puisque son but était d'immortaliser ces peuples avant qu'ils ne disparaissent complètement.
Lorsqu'il commença son projet, dans les années 1910, nombre d'Indiens vivaient déjà dans des réserves et certaines photos - les danses, les départs au combat - ont été "interprétées". Il influencera d'ailleurs Robert Flaherty qui peu après réalisa Nanouk L'Esquimau et l'Homme d'Aran de la même manière. 
Mais surtout, il fit des portraits saisissants et particulièrement nombreux des différents membres des 80 tribus avec lesquelles il partagea une partie de son existence. 
Il tenait à ce que ces photos apparaissent dans des portfolios de haute qualité, 20 en tout, projet qui le ruina mais auxquels Roosevelt finit par rendre hommage. 
Ethnologue autodidacte, il prit également des notes sur le vocabulaire, les vêtements, les rites des Indiens. 
La population indienne l'accepta auprès d'elle après qu'il eut fait ses preuves auprès des toutes premières, et il put assister lui-même à certains de leurs rituels. Il rencontra la fille du chef Sealth, qui donna son nom à la ville de Seattle, accompagna les Makas à la pêche, photographia les coiffures des femmes, les coiffes des médecine Man et des chefs, étudia les différentes physionomies.
Ce livre regroupe la totalité des 20 portfolios qui sont chacun dédié à une ou plusieurs tribus voisines: les photographies sont magnifiques, certaines artistiques, d'autres ethnographiques. 
Mon seul et très grand reproche et l'absence d'une carte détaillée avec le nom de chacune des 80 tribus répertoriées, ou tout simplement le nom de l'état concerné à chaque portfolio... du coup il est compliqué, voire impossible de situer tel lac,telle montagne ou tel type d'habitation, et c'est bien dommage!






dimanche 11 décembre 2016

Tout ce dont on rêvait, de François Roux

Difficile de faire plus contemporain que ce livre qui se termine quelques mois après l'attentat de Charlie Hebdo. C'est toute une famille qui passe au scalpel, une famille normale, peut-être vous, vos voisins, vos amis. 
François Roux passe presque tout en revue des dernières décennies: mai 68, le socialisme, puis la crise, le chômage, la radicalisation, la pollution, la frontière entre trois générations, l'une engagée, la deuxième désabusée, affaiblie par tous ces messages médiatiques qui nous sautent à la figure, et une troisième qui apparaît plus sûre d'elle, unie par les réseaux sociaux et un nouveau modèle d'engagement.
Heureusement, ce roman n'est pas juste un kaléidoscope de ce qui a fait les années 90 et 2000; Justine, Nicolas, leur fille Adèle existent réellement dans ses mots et souffrent, pensent, changent, espèrent, se dépatouillant tant bien que mal dans ce monde moderne étriqué. Bien que commençant par Justine, c'est la perte d'emploi de Nicolas qui devient le sujet principal du roman. Le sujet n'est sans doute pas nouveau, mais la manière dont l'auteur nous mène à considérer la lente chute de Nicolas et de son couple est tout simplement bouleversante. Pas d'exagération, de trémolo ni de pathétisme dans ces quelques années qui vont peu à peu détruire le couple, seulement une étude de cas lucide et déprimante.
Et puis il y a le père de Justine, aigri, devenu fasciste et qui n'a jamais eu un mot encourageant envers sa fille; sa mère, qui accepte de sacrifier sa vie à cet homme repoussant. Il y a Adèle, jeune adolescente porteuse d'espoir et de maturité, et Alex, le frère de Nicolas par qui tout a commencé, séduisant et sûr de lui. Au centre de tout ça, il y a surtout Justine elle-même, révoltée, porteuse d'une colère qu'elle ne sait plus vers quoi diriger, embourbée dans la surcharge des problèmes dont nous assènent les médias jour après jour.
J'ai eu peur en lisant les premières pages du livre qui ne font pas honneur au reste, trop caricaturales et dures quand la suite est tellement plus travaillée. C'est un constat malheureusement bien déprimant de la société actuelle mais pas défaitiste ni moraliste.
Je ne sais pas si ce roman franchira les années tellement il est ancré dans une période bien précise, donc je vous conseille fortement de le lire aujourd'hui, tout de suite, parce que c'est à nous qu'il parle.

Merci à Babelio et à Albin Michel pour cette lecture.